Le bouddhisme est-il une religion ou une philosophie ? Est-il nécessaire de croire au Bouddha pour être bouddhiste ?
Tant d’Occidentaux se tournent depuis des années vers les voies spirituelles orientales, le bouddhisme, le chamanisme… Parfois, justement parce qu’ils sont mal à l’aise avec l’injonction d’une religion monothéiste qui demande à croire aveuglément en des préceptes ou des lois qu’ils n’ont pas assez éprouvés, ceux-ci s’éloignent de la religion.
L’un des premiers enseignements du Bouddha Sakyamuni, le Bouddha historique, est : ne croyez pas ce que je vous enseigne ; éprouvez-le par vous-mêmes. Méditez sur les enseignements, affinez-les au regard de votre expérience, étudiez-les avec patience et constance. Passez du temps seuls à méditer. Affûtez votre discernement, votre observation, votre attention vigilante, alors, la compréhension ne restera pas un concept, mais une certitude.
Les enseignements du Bouddha font appel à l’analyse objective, à l’observation impartiale des phénomènes, de leurs causes et de leurs effets. Bien sûr, cette observation dépasse le stade de l’analyse intellectuelle et philosophique. Avec l’expérience, la méditation dissout progressivement les voiles de l’illusion, et nous invite à changer notre comportement, à devenir plus patient, plus généreux, plus humble, plus attentif aux autres, plus joyeux aussi. La pratique de la méditation aiguise également nos autres formes d’intelligence : l’intelligence du corps, l’intelligence du cœur.
Ainsi, il n’est pas nécessaire d’être bouddhiste pour observer, par exemple, que tous les êtres vivants, qu’ils soient humains ou animaux, ont en commun le fait d’aspirer au bonheur. Tous veulent éviter la souffrance. Nous pouvons constater aussi, objectivement, ce qui génère la souffrance, l’attachement, l’illusion, la colère, la peur. Nous pouvons méditer sur ces poisons de l’esprit que sont l’attachement, l’illusion, la colère ou la peur, comment il est possible de les éradiquer par la méditation, l’introspection et l’observation de notre comportement.
En réfléchissant à notre comportement, nous pouvons tous identifier ce qui crée de la souffrance chez nous et autour de nous. Nous avons tous le pouvoir de rectifier notre attitude dans nos relations, dans notre parole, dans nos interactions et dans nos choix.
En cela, le bouddhisme est une voie qui nous encourage à nous transformer quotidiennement, à relever ce qui nous perturbe, ce qui nous illusionne et ce qui crée chez nous de la souffrance, pour nous permettre de nous libérer jour après jour en aspirant à l’esprit d’éveil, un esprit qui va au-delà des illusions de l’ego. Le bouddhisme nous fait réaliser combien nous sommes tous liés les uns aux autres et combien nous pouvons chacun prendre soin des personnes qui nous entourent et envers lesquelles nous apprenons jour après jour à ouvrir notre cœur.
En ce sens, le bouddhisme ne se limite pas à une analyse intellectuelle ou philosophique. C’est une voie complète qui nous invite à nous transformer, à être davantage dans notre corps, à maintenir notre cœur ouvert avec chacun, et à ouvrir notre esprit.
C’est en cela que le bouddhisme tibétain comme la méditation resteront toujours une voie résolument moderne et adaptée à cette crise de sens que chacun peut traverser.
Arnaud Riou