Beaucoup de femmes (et d’hommes) se consacrent à leurs enfants, à leur conjoint, à leur boulot sans écouter leurs propres besoins et sans poser leurs limites. Elles finissent souvent exténuées et accablées par un sentiment d’injustice.

D’autres sont tant tournés sur leur nombril qu’ils ne sont capables d’aucune générosité. À mes yeux, les uns et les autres font autant de mal à eux qu’à leur entourage.

Alors qu’est-ce qui est le plus important : s’occuper de soi ou s’occuper des autres ?

La peur d’être taxés d’égoïsme nous empêche souvent de prendre soin de nous.
Pourtant, pour s’occuper des autres, n’est-il pas nécessaire de savoir s’occuper de soi ? Nous ne pouvons offrir nos fruits si notre arbre est sec. Nous ne pouvons offrir un concert si nous n’avons pas appris à jouer de notre instrument… Dans le bouddhisme tibétain, l’ambition la plus haute est de devenir un Boddhissatva, un être qui consacre sa vie à aider les autres comme l’ont été le Bouddha et tant de saints. Cet idéal arrive après une longue introspection.

L’introspection commence par la méditation. En méditant, nous apprenons à canaliser nos émotions et leurs interactions avec nos actes. Nous apprenons à être plus conscients de nos gestes et de nos paroles, de notre responsabilité. Nous affinons notre sensibilité.

Progressivement, avec la pratique de la méditation, nous devenons moins réactifs, plus calmes et plus en lien avec l’essentiel. Nous posons progressivement des actes plus éthiques et plus conscients dans notre quotidien. Lors de cette période, nous sommes égocentriques. Nous tournons notre attention autour de notre propre centre.

Puis, lorsque nous sommes apaisés, vient le temps de nous ouvrir à notre famille, à nos amis, le premier cercle de relation. Nous devenons alors ethnocentriques, nous prenons soin de notre ethnie. Nous savons facilement repérer ce qui affecte nos proches puisque nous avons déjà fait le voyage pour nous.

Une fois que notre environnement proche est stabilisé, nous pouvons établir des relations constructives avec toutes les personnes avec qui nous sommes en lien, et nous montrer aussi attentifs au gardien de l’immeuble qu’à la boulangère. Nous traitons chacun avec le même égard. Nous cessons d’être ethnocentriques et devenons mondocentriques. Non seulement nous prenons soin de nos proches, mais nous prenons conscience que nous sommes tous interconnectés. Cette ouverture à l’autre s’étend progressivement aux inconnus, aux animaux, à nos ennemis. Prendre soin de l’autre devient alors naturel et ne nous demande aucun effort.

Nous prenons alors conscience des interactions des uns et des autres et réalisons que prendre soin de l’arbre, c’est prendre soin de la forêt.